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Actes du webinaire “L’activité physique des séniors”

Mardi 08 juin 2023 de 10h00 à 11h30

10h00 : INTRODUCTION

Farid Taleb, directeur de l’association Futurâge

Bonjour à toutes et à tous. Merci de votre présence pour ce nouveau webinaire Futur âge. Nous sommes ravis d’aborder ce sujet aujourd’hui autour des bienfaits de l’activité physique pour les seniors et son importance au niveau de la santé physique, psychologique et social.

Jean-Charles Pomerol, président de l’association Futurâge

Bonjour à Joël Belmin, Je suis très content qu’il ait pris le temps de venir nous expliquer tous les bienfaits de l’activité physique. On a déjà travaillé sur ce sujet. C’est un sujet très important notamment pour éviter ou reculer au maximum la perte d’autonomie. Bonjour à tous les participants. Je les remercie de l’intérêt qu’ils portent au travail de de FuturÂge et je souhaite une bonne écoute, merci.

 

10h05 : Maintenir les capacités fonctionnelles : la prévention par l’activité physique

Intervenant : Professeur Joël BELMIN, chef du pôle gériatrique de l’hôpital Charles-Foix et professeur à Sorbonne Université

Je voudrais tout d’abord remercier Futurâge de son invitation, ça me fait grand plaisir de saluer Jean-Charles POMEROL et Farid TALEB, ainsi que toutes les personnes qui sont connectées. Alors je ne pourrais pas tout dire de l’activité physique et de ses bienfaits car c’est un sujet extrêmement important et extrêmement vaste. Mais je vais essayer de vous donner quelques aspects sur les bienfaits physiques et je vais insister davantage sur les effets sur la sarcopénie, la fragilité. Je vais focaliser mon propos sur les données qu’on appelle « evidence based Medicine », c’est-à-dire des données pour lesquelles on a des niveaux de connaissances scientifiques ou des notions de preuves scientifiques. Je serai à votre disposition pour discuter des aspects qui seront abordés dans ma présentation.

La première idée c’est la prévention, vieillir en restant actif et autonome, c’est un des enjeux majeurs pour le vingt-et-unième siècle. Vous savez à quel point le vieillissement prend de l’importance. Le nombre de personnes qui atteignent des âges avancés augmente. C’est une grande chance. C’est crucial de gagner ces années de vie en bonne santé, en tout cas au moins en indépendance. Et retarder la dépendance est un enjeu crucial, qui est d’ailleurs lié au fait de rester vivre à son domicile (aspiration de de la plupart des personnes âgées). Il y a également des enjeux économiques, comme diminuer les coûts liés à la dépendance. Aujourd’hui, pratiquer une activité physique est le principal levier pour favoriser cette prévention en gérontologie.

Le concept général qui est très promu aussi par l’Organisation mondiale de la santé, c’est que cela commence par les pertes de fonctionnalités qu’on observe au cours du vieillissement, qui vont toucher la mobilité et la force musculaire, les fonctions cognitives, les aspects concernant la psychologie, les aspects sensoriels, les aspects concernant l’administration, l’alimentation ou même le contrôle sphinctérien. Quand ces pertes fonctionnelles vont progresser, ou bien être aggravées par des maladies, on va avoir l’apparition des syndromes gériatriques (les chutes répétées, la dépendance à des nutritions et cetera). Ces syndromes gériatriques vont avoir un certain nombre de conséquences cliniques par rapport au mode de vie des personnes, au besoin d’aide, l’hospitalisation l’institutionnalise et la mortalité. L’activité physique va agir sur ces pertes de fonctionnalités liées à l’âge.

J’ai des niveaux de preuve importants que l’activité physique a des effets intéressants. Lorsque l’on s’intéresse à la prévention gérontologique, l’une des premières idées est d’agir sur la fragilité, qui peut être identifiée. Certaines personnes sont plus à risque de développer des problèmes gérontologiques. Nous pouvons cibler cette population, ce qui la rend plus accessible. Les personnes les plus à risque sont celles que l’on appelle “très fragiles” ou “fragiles”, et nous disposons d’outils pour les identifier, tels que les critères de fragilité de Freed.

Etude

Il existe une littérature scientifique intéressante sur ces personnes fragiles, notamment sur les effets de l’activité physique chez elles. Je vais vous présenter un résultat très intéressant d’une étude menée à Singapour, qui est un essai randomisé. Ils ont travaillé avec plus de 240 personnes âgées, qui étaient soit fragiles, soit très fragiles. Ils ont réalisé 5 types d’interventions : un groupe placebo qui ne recevait aucune intervention particulière, un groupe avec un entraînement physique intense, un groupe avec un entraînement cognitif, un groupe avec une intervention nutritionnelle, et un groupe combiné où tous les types d’intervention étaient mélangés. Cette étude a duré 6 mois et les participants ont été suivis pendant 12 mois.

Lorsque l’on regarde les détails des interventions, on remarque que l’activité physique était significative. Les participants avaient 2 séances par semaine pendant 12 semaines, d’une durée de 1h30 chacune, encadrées par un professionnel. Les exercices visaient à améliorer la force musculaire et l’équilibre, notamment grâce à des exercices de résistance.

Les résultats ont montré que par rapport au groupe placebo, l’activité physique permettait d’améliorer et de réduire la fragilité chez environ 1/3 à la moitié des personnes. Les interventions les plus efficaces pour atténuer la fragilité étaient l’exercice physique et les interventions combinées. Un paramètre fonctionnel très apprécié dans les études gérontologiques et gériatriques est la vitesse de marche, qui a été mesuré. Comparé au groupe témoin qui avait la vitesse de marche la plus basse, l’activité physique et les interventions combinées ont permis de maintenir ou d’améliorer cette vitesse.

De plus, on constate que l’activité physique et les interventions combinées sont les plus efficaces pour améliorer la force musculaire, par rapport par exemple aux interventions nutritionnelles seules. En revanche, ces interventions n’ont pas montré beaucoup d’efficacité dans la diminution de l’autonomie, des hospitalisations ou des chutes. Les auteurs de l’étude ont expliqué que ces effets n’ont peut-être pas été observés en raison d’une durée trop courte de l’étude.

Méta-analyses

Un autre type d’approche dans la littérature scientifique concerne les méta-analyses. Ces auteurs ont recherché toutes les études portant sur des sujets tels que la réduction de la fragilité. Ils ont compilé les résultats, identifiant ainsi trente-et-une études, dont de nombreux essais randomisés, englobant plus de 4 4500 participants. Leur objectif était d’examiner les effets de ces interventions, en particulier sur le statut de fragilité, la vitesse de marche et la force musculaire.

En analysant les résultats, nous constatons que les interventions comportant une activité physique ont eu le meilleur effet sur la réduction de la fragilité. De plus, les interventions mixtes incluant une activité physique ont également montré une efficacité, comme le montrent les effets observés sur la vitesse de marche. En revanche, les suppléments nutritionnels seuls n’ont pas eu d’effet significatif.

Sur le plan quantitatif, il est intéressant de noter qu’un tiers des participants ont amélioré leur niveau de fragilité ainsi que leur vitesse de marche. Ces résultats sont donc très encourageants. En ce qui concerne la force musculaire des membres inférieurs, nous constatons une amélioration significative chez les personnes qui ont fait de l’exercice physique. Cette amélioration s’élève à 61%, ce qui est important étant donné que la force musculaire des membres inférieurs joue un rôle essentiel dans la marche et l’équilibre.

Ces résultats démontrent donc que l’activité physique permet d’améliorer plusieurs paramètres fonctionnels, tels que la force musculaire et le niveau de fragilité. Il semble que cette approche soit plus efficace que d’autres interventions, notamment celles d’ordre nutritionnel et cognitif.

En outre, une étude intéressante menée à Taïwan et publiée après ces méta-analyses mérite d’être mentionnée. Cette étude a porté sur un échantillon de plus de 600 personnes âgées de plus de 65 ans, présentant une polypathologie, c’est-à-dire trois maladies chroniques. Il s’agissait d’un essai randomisé comprenant un groupe témoin ne recevant aucun traitement particulier, et un groupe recevant ce qu’on appelle une intervention multi-domaine. Cette dernière consistait en un programme d’activité physique sur une durée de deux mois, ainsi qu’en des soins individualisés dispensés par une équipe gériatrique.

L’intervention multi-domaine a été étudiée pour mesurer ses effets sur la qualité de vie, la cognition et la dépendance après un an. Les résultats montrent une amélioration significative de la qualité de vie chez les personnes ayant bénéficié de cette intervention par rapport aux soins usuels. Des bénéfices cognitifs ont également été observés. De plus, cette étude démontre pour la première fois une amélioration du niveau de dépendance grâce à l’intervention multi-domaine, ce qui est statistiquement significatif. Ces résultats suggèrent que les programmes incluant une activité physique peuvent être efficaces non seulement pour la force musculaire et la fragilité, mais aussi pour réduire la dépendance.

L’activité physique a des effets démontrés en gériatrie, notamment sur la mobilité et l’équilibre, visant à réduire le risque de chute. Elle agit directement sur le fonctionnement musculaire, mais elle a également d’autres effets bénéfiques sur le cerveau, le métabolisme et le système immunitaire. En vieillissant, les masses musculaires diminuent considérablement, ce qui entraîne une baisse de la force musculaire. Des études épidémiologiques montrent une diminution globale de la force musculaire avec l’âge, tant chez les hommes que chez les femmes, bien que les hommes aient généralement une force musculaire supérieure. Cependant, le déclin de la force musculaire est plus marqué chez les hommes.

Sur ce diapo, j’ai présenté les seuils de la sarcopénie, qui est la perte de masse et de force musculaire chez les personnes âgées. La mesure a été effectuée sur la force de préhension, c’est-à-dire la force développée par la main. Des résultats similaires sont observés pour la force des membres inférieurs, tels que l’extenseur de jambe. En vieillissant, la force musculaire diminue, atteignant éventuellement le seuil de la sarcopénie sévère. Certains individus subissent un vieillissement réussi et perdent moins de muscles, tandis que d’autres connaissent un vieillissement accéléré avec une perte de fonctions musculaires plus importante. La sarcopénie entraîne une asthénie (fatigue), une diminution de la mobilité, des chutes répétées, des fractures, une dépendance et une altération de la qualité de vie. Des études montrent également des liens avec des hospitalisations, l’entrée en institution et la mortalité. La sédentarité est l’une des causes importantes de la sarcopénie, avec une fonte musculaire plus prononcée chez les personnes âgées sédentaires par rapport à celles qui maintiennent une activité physique régulière. Certaines maladies peuvent également aggraver la perte de force musculaire liée au vieillissement. Des outils de diagnostic de la sarcopénie ont été développés par des chercheurs pour faciliter la prévention et le traitement de cette condition.

Séances sportives supervisées

Finalement, l’activité physique s’avère être le meilleur moyen de prévenir ou inverser la sarcopénie. Des niveaux importants d’activité physique sont nécessaires, avec 1 à 2 séances supervisées, intenses et encadrées par un moniteur. Ces types d’activités physiques, notamment celles impliquant une résistance, améliorent la fonction musculaire. Il est également conseillé d’adopter des activités de groupe ou d’autres natures entre les séances supervisées, car elles ne suffisent pas seules. Cependant, le point central reste la notion de séance supervisée intense, dirigée par un entraîneur physique.

Des essais randomisés menés auprès de personnes atteintes de sarcopénie, y compris des individus de plus de 80 ans, ont montré des résultats significatifs avec ces interventions. Un éducateur sportif recommande au moins 2 séances par semaine et différents types d’exercices, notamment des exercices de résistance ou mixtes. Ces études ont évalué les effets sur la force musculaire et certains paramètres fonctionnels tels que la vitesse de marche, qui ont montré des améliorations significatives. Les exercices de résistance ont un impact important sur la force musculaire, comme en témoignent les résultats des études sur l’extension des jambes. Les exercices combinés améliorent également la force musculaire, mais les exercices d’aérobie (cardio-training) n’ont pas d’effet significatif sur celle-ci. En ce qui concerne la vitesse de marche, un paramètre fonctionnel important, les programmes d’exercices ciblant la sarcopénie ont montré une amélioration significative. Ces résultats sont si intéressants qu’il existe d’autres études prometteuses sur l’activité physique.

Prescription par les médecins

Aujourd’hui, les médecins sont encouragés à prescrire l’activité physique, appelée “activité physique adaptée”, pour les personnes atteintes de maladies chroniques. Nos autorités de santé nous indiquent clairement qu’il faut mentionner sur une ordonnance la pratique d’une activité physique. Cette recommandation a des raisons psychologiques et symboliques. En prescrivant l’activité physique à la fin de la consultation, cela diffère car c’est écrit et prescrit. Pour les personnes atteintes de maladies chroniques, il est recommandé de faire appel à des professionnels paramédicaux tels que les kinésithérapeutes, les psychomotriciens, les ergothérapeutes, ainsi qu’à des éducateurs sportifs ou des enseignants en activité physique adaptée. Cette activité doit être adaptée à la pathologie, aux capacités physiques et aux risques médicaux potentiels des patients. Actuellement, certains organismes de santé complémentaires et certaines collectivités locales remboursent les premières séances. L’idée est d’encourager au maximum les gens à commencer, car cela leur fera du bien et peut-être qu’ils continueront par la suite. Le remboursement par la sécurité sociale n’est pas encore très bien organisé.

En ce qui concerne l’avenir, quelles activités physiques faut-il privilégier pour lutter contre la sarcopénie ? Le renforcement musculaire est recommandé, avec des exercices de résistance tels que la presse en kinésithérapie. Si on n’a pas de matériel, on peut réaliser chez soi des exercices simples tels que se lever d’une chaise ou se mettre sur la pointe des pieds. D’autres types d’exercices ne ciblent pas spécifiquement la sarcopénie, mais sont très intéressants, comme les exercices d’équilibre et de postures pratiqués dans le Tai Chi. Cela contribue également à la prévention des chutes. Il existe d’autres types d’exercices axés davantage sur le bien-être, tels que les exercices visant la souplesse et la relaxation.

Freins à l’activité physique

L’activité physique et l’activité physique adaptée sont extrêmement importantes pour la prévention en gérontologie et pour les personnes atteintes de maladies chroniques. Cependant, la mise en œuvre de ces programmes rencontre de nombreux obstacles, tant au niveau individuel que collectif. Les patients font face à des problèmes d’image de soi, de sociabilité, d’estime de soi et à des idées préconçues négatives. Certains ont peur de se blesser ou de faire une crise cardiaque. Des problèmes organisationnels existent également, tels que l’inaccessibilité des services ou leur coût élevé. De plus, la procrastination joue un rôle, où les gens promettent de s’engager dans l’activité physique, mais repoussent continuellement. Ces obstacles sont également présents à un niveau collectif. Les médecins peuvent manquer de formation ou de motivation, et certains peuvent être pessimistes quant à la possibilité de réussir. Le manque de remboursement constitue également un frein. Il est essentiel que tous les professionnels de santé s’engagent dans cette démarche, pas seulement les médecins. Bien que des efforts aient été déployés par certaines collectivités locales pour rendre l’offre d’activités physiques abordable et accessible, il reste encore des améliorations à apporter. De plus, les politiques de santé nationales peuvent être en retard par rapport à celles des pays d’Europe du Nord, qui adoptent une approche plus volontariste.

Sport tout sa vie

La préservation de la fonction musculaire tout au long du vieillissement commence dès le plus jeune âge. Il est essentiel d’augmenter le pic de la fonction musculaire en faisant beaucoup de sport et de renforcement musculaire dès la jeunesse. Par la suite, il est important de rester actif tout au long de la vie afin de ralentir le déclin musculaire et de vieillir avec succès, en évitant d’atteindre le seuil de sarcopénie. L’activité physique joue un rôle crucial dans la lutte contre la fragilité et la sarcopénie. De nombreuses données scientifiques soutiennent cette idée et soulignent la nécessité d’intégrer l’activité physique dans une approche globale. L’Organisation mondiale de la santé a déclaré la décennie 2030 comme étant celle de la promotion du vieillissement en bonne santé, et recommande de mobiliser tous les leviers de la prévention au cours de cette période. Il est important de noter que la prévention gérontologique ne remplace pas la prévention classique des maladies, telles que les maladies cardiovasculaires et les cancers, où l’activité physique joue également un rôle important. Tout se complète pour former une association bénéfique autour de l’activité physique, qui doit être activement promue.

Je tiens à vous remercier de m’avoir écouté. Je reste à votre disposition pour toute question que vous pourriez avoir.

Jean-Charles POMEROL

Dans l’étude de Singapour, tu as mentionné une amélioration des capacités des personnes grâce à l’activité physique, entre autres. Tu as également souligné que la combinaison des interventions était encore plus efficace. Cependant, j’ai compris que cela n’avait pas beaucoup d’impact sur les interventions à l’hôpital. Est-ce que j’ai bien compris ?

Joel BELMIN

Oui, tout à fait. Si vous vous souvenez du diagramme que j’ai montré sur les activités physiques, les capacités fonctionnelles, les syndromes gériatriques, les critères durs tels que la mortalité, l’entrée en institution et l’hospitalisation, ainsi que les effets sur la force musculaire et la vitesse de marche, ce sont ce qu’on appelle des critères internes, mais pas des critères finaux. Les critères finaux seraient en réalité d’éviter le déclin de l’autonomie et les hospitalisations. Pour étudier ces critères finaux, il faudrait des études à plus grande échelle et sur des durées plus longues. C’est pourquoi j’ai mentionné l’étude de Taiwan, qui est l’une des premières à avoir un effectif important et à étudier sur 12 mois, et qui présente déjà des résultats intéressants sur le déclin de l’indépendance.

Actuellement, dans la prévention, nous nous concentrons sur des critères intermédiaires, des critères fonctionnels. Cependant, nous aimerions disposer de données plus approfondies sur des critères plus rigoureux, tels que l’évitement du déclin de l’autonomie et des hospitalisations, voire même des décès. Cela nécessiterait des études à plus long terme et avec des effectifs importants, car il existe de nombreux facteurs de déclin, de mortalité et d’hospitalisation qui sont complexes et peuvent créer du bruit de fond dans les résultats.

En résumé, il est nécessaire de mener des études à plus grande échelle et sur des durées plus longues pour évaluer les critères finaux tels que l’évitement du déclin de l’autonomie, des hospitalisations et des décès. Actuellement, les recherches se concentrent sur des critères internes et des critères fonctionnels, mais des données plus approfondies sont nécessaires pour mieux comprendre ces aspects.

 

10h30 : L’impact de l’activité physique sur le vieillissement cognitif

Intervenant : Néva BERAUD-PEIGNE, doctorante au sein de l’école doctorale Sciences du Sport, de la Motricité et du Mouvement Humain de l’Université Paris-Saclay

Dans cette intervention, je vais aborder l’impact de l’activité physique sur les fonctions cognitives. Je vais également vous présenter certaines de mes recherches, en particulier mon projet de thèse portant sur les effets d’un programme d’activité physique combinée sur le vieillissement cognitif. Nous avons approfondi un modèle appelé le modèle d’Herold. En termes plus simples, l’objectif de ma thèse est de trouver le programme optimal pour améliorer à la fois les capacités physiques et cognitives des seniors.

Pour introduire cette partie de la conférence, j’aimerais citer une phrase qui sera le fil conducteur de mon argumentaire : “Ce qui compte, c’est combien d’années vous avez avant de perdre la tête, non combien d’années vous avez en restant debout.” Pour illustrer cela, je vais vous présenter deux personnes, Jean et Henriette, tous deux âgés de 70 ans. Henriette vient de terminer un marathon et vit chez elle, tandis que Jean doit rentrer en EHPAD.

Ce schéma représente leur niveau cognitif, Henriette étant en rouge et Jean en jaune. À l’âge de 20 ans, ils avaient le même niveau de santé physique et cognitive, comme le montrent les points se regroupant sur le graphique. Cependant, Henriette a pratiqué une activité physique tout au long de sa vie, a joué du piano et a exercé un métier stimulant, ce qui a entraîné une augmentation progressive de son niveau cognitif entre 20 et 50 ans, suivi d’un déclin progressif de ses fonctions cognitives lié au vieillissement normal. En revanche, Jean a mené une vie inactive, était sédentaire, a exercé un métier peu stimulant et détestait les instruments de musique, ce qui a entraîné une diminution continue de son niveau cognitif tout au long de sa vie.

Le problème réside dans le fait qu’à l’âge de 60 ans, Jean commence à rencontrer des difficultés à effectuer simultanément deux tâches, à retenir des commandes lorsqu’il doit les exécuter, tandis que cela ne pose aucun problème à Henriette, qui continue à organiser de nombreux dîners avec ses amis. Malheureusement, arrivé à 70 ans, Jean passe en dessous du seuil fonctionnel, ce qui signifie qu’il a besoin d’aide dans ses activités quotidiennes et qu’il doit rentrer en EHPAD pour recevoir une assistance quotidienne.

Alors que vous pouvez observer sur le graphique, à l’âge de 70 ans, Henriette est encore en pleine forme. Ce qui est encore plus intéressant, c’est que si Jean avait 60 ans, représenté par la courbe verte, il aurait pu modifier certains de ses comportements. En réalité, il aurait pu bénéficier d’une amélioration de ses fonctions cognitives, retardant ainsi l’atteinte du seuil fonctionnel. On peut voir que la courbe verte se situe en dessous du seuil fonctionnel, indiqué en vert, à 90 ans. Par conséquent, il aurait pu repousser son entrée en EHPAD de plusieurs années. Cette question de l’incapacité est particulièrement importante compte tenu du vieillissement de la population, qui ne cesse d’augmenter depuis des décennies, ainsi que de l’augmentation de l’espérance de vie.

En 2012, l’espérance de vie des femmes à l’âge de 65 ans était d’environ 23 ans, ce qui signifie qu’elles pouvaient espérer vivre jusqu’à environ 88 ans. Cependant, il est moins réjouissant de constater qu’elles passeraient les 13 dernières années de leur vie avec des incapacités, limitant ainsi leurs activités quotidiennes. Les conclusions sont similaires chez les hommes. Il est donc nécessaire de développer des stratégies préventives efficaces pour améliorer à la fois les capacités physiques et cognitives des seniors, comme Jean. Les fonctions cognitives, qui nous permettent d’interagir avec notre environnement, sont cruciales. Elles comprennent la capacité de raisonner, de se concentrer, d’acquérir des connaissances, et sont donc essentielles pour la qualité de vie et l’autonomie des personnes âgées. Malheureusement, ces fonctions cognitives diminuent au cours du vieillissement, que l’on ait adopté de bonnes habitudes de vie ou non, notamment les fonctions exécutives situées dans le lobe frontal.

Les fonctions exécutives sont particulièrement importantes, notamment pour planifier des actions, s’organiser et synchroniser des actions complexes. Elles permettent aux individus de s’adapter à des situations inconnues ou non routinières, et de mettre en place des stratégies. Le déclin de ces fonctions a des répercussions sur la vie quotidienne des personnes âgées. Il existe quatre fonctions exécutives sur lesquelles je travaille particulièrement et qui sont affectées par le vieillissement. La première est l’inhibition, qui consiste à empêcher une réponse automatique et à arrêter une réponse en cours afin de se concentrer sur les informations pertinentes. Ensuite, il y a la mémoire de travail, qui correspond à la capacité de maintenir une information en mémoire tout en l’utilisant pour résoudre un problème, comme dans le cas du calcul mental. La flexibilité mentale permet de passer rapidement d’un comportement à un autre en déplaçant son attention sans perdre le fil des deux actions. Enfin, il y a la planification, qui consiste à organiser une série d’actions en une séquence optimale pour atteindre un objectif.

Ce qui est le plus intéressant dans tout cela, c’est que les fonctions cognitives exécutives, qui déclinent avec le vieillissement, sont également les plus sensibles aux effets positifs de l’activité physique. Ce sont elles qui bénéficieront en premier des améliorations grâce à l’activité physique.

Pour vous expliquer brièvement les mécanismes neurophysiologiques qui se produisent lorsque nous faisons de l’activité physique, il y a quatre mécanismes qui agissent en synergie. Premièrement, il y a l’angiogenèse, qui engendre la création de nouveaux capillaires sanguins permettant une meilleure oxygénation du cerveau. Ensuite, il y a la neurogenèse, qui favorise la création de nouveaux neurones dans le cerveau. La synaptogenèse est le processus de formation de nouvelles connexions entre les neurones, ainsi qu’une amélioration de leur efficacité. Enfin, il y a la synthèse de neurotransmetteurs et d’hormones, ce qui permet une libération et une augmentation des récepteurs. Ces quatre processus améliorent l’efficacité des réseaux neuronaux, ce qui se traduit ensuite par une amélioration des fonctions cognitives.

Mais concrètement, comment obtenir ces effets grâce à l’activité physique ? Il existe de nombreuses formes d’activités physiques différentes. Je vais vous présenter les recommandations établies par la méta-analyse de Colcombe et Kramer en 2003, complétées par l’étude d’Audi Frêne. Les types d’entraînement les plus efficaces pour améliorer les fonctions cognitives chez les seniors sont les entraînements multidomaines, impliquant différents types d’activités physiques, tels que l’endurance, la force et la souplesse. La durée recommandée pour ces programmes est de plus de 6 mois, il s’agit donc de programmes de longue durée. Il est même recommandé de réussir à ancrer les participants dans une pratique pérenne qui dure pendant des années. La fréquence recommandée est d’au moins 2 séances par semaine, d’une durée de 30 à 45 minutes, à une intensité cible. L’intensité recherchée est modérée, afin de générer des bénéfices.

Maintenant, la question qui se pose est la suivante : quelles sont concrètement les modalités à adopter ? En d’autres termes, quelle activité physique choisir pour obtenir ces effets bénéfiques ? De plus, il est essentiel de trouver des moyens de créer du plaisir et de favoriser l’adhésion afin que les participants continuent à pratiquer une activité physique tout au long de leur vie. L’entraînement combiné peut être une solution optimale. Comme je l’ai mentionné précédemment, l’entraînement combiné implique la combinaison de plusieurs activités, mais ce qui est encore plus intéressant et soutenu par la recherche, c’est de parvenir à combiner la stimulation physique et la stimulation cognitive au sein d’une même activité physique. La stimulation physique, comme je l’ai expliqué précédemment, permet de déclencher de nombreux mécanismes neurophysiologiques favorisant la plasticité cognitive. Quant à la stimulation cognitive, elle oriente la plasticité en favorisant, par exemple, la survie de nouvelles cellules et la régulation des changements au niveau des synapses. De plus en plus d’études démontrent les bienfaits de ces entraînements combinés chez les personnes âgées.

Cependant, l’entraînement combiné est confronté à plusieurs problématiques, notamment celle de proposer un entraînement adapté aux seniors. Il n’est pas toujours facile de trouver des activités physiques qui intègrent ces deux domaines tout en étant adaptées, et de générer à la fois une intensité physique modérée et une intensité cognitive suffisamment élevée. Enfin, la question cruciale, que Sterenn abordera également par la suite, concerne le plaisir et l’adhésion nécessaires pour ancrer les participants dans une pratique durable. Ma question pour vous est la suivante : si on vous demandait de proposer une activité physique pour les seniors, quelle serait votre suggestion ?

Dans vos réponses, nous avons principalement des pratiques individuelles qui peuvent être réalisées de manière collective, telles que la gymnastique, la marche nordique et la natation. En effet, ces pratiques sont mises en place dans la majorité des études et ont démontré des effets positifs sur les fonctions cognitives des seniors. Cependant, le problème réside dans le fait qu’en pratique, sur le terrain, nous ne constatons pas toujours une adhésion élevée à ces programmes, sauf dans le cadre d’études très contrôlées où les participants sont présents aux séances. Cela soulève la question du plaisir : est-ce que ces activités, comme la marche, le yoga ou la gymnastique douce, procurent réellement du plaisir aux participants ? De plus, ces activités ne génèrent pas une combinaison de stimulation physique et cognitive. La stimulation cognitive y est présente de manière limitée, alors que c’est précisément ce qui a été démontré comme étant le plus bénéfique pour améliorer les fonctions cognitives des seniors.

Permettez-moi de vous présenter une étude que j’ai réalisée il y a deux ans. Il s’agit d’une petite étude portant sur des activités collectives de coopération et d’opposition. Sterenn vous présentera également les activités mises en place chez MooveToi. Ces activités sont inspirées des sports collectifs tels que le basket-ball, la boxe ou le handball, adaptées bien sûr aux participants. Comme on dit, “on peut pratiquer n’importe quoi tant que c’est adapté”. Nous avons mis en place une étude comparant un groupe qui participait à un programme d’activités collectives de coopération et d’opposition à un groupe témoin qui ne pratiquait pas d’activité physique. Nous avons constaté une amélioration de la planification, dont j’ai parlé précédemment, ainsi que de la mémoire visuo-spatiale à court terme chez les personnes ayant suivi notre programme de coopération et d’opposition. Je ne vais pas entrer dans les détails, mais si vous avez des questions, nous pourrons en discuter davantage. Le programme consistait en deux séances d’une heure par semaine pendant trois mois. De plus, nous avons constaté un maintien de l’équilibre dynamique chez nos participants, alors qu’il se détériorait chez les membres du groupe témoin.

Un autre outil qui peut être particulièrement intéressant et qui gagne en popularité est celui des exergames. Les exergames sont des jeux vidéo actifs. Nous avons réalisé une deuxième étude en utilisant cet outil, plus précisément des exergames assistés par un mur immersif et interactif. Cet outil est particulièrement intéressant car il offre une expérience plus immersive que les exergames classiques tels que la Wii, qui sont largement utilisés dans les études auprès des seniors. De plus, il permet de générer une motricité complexe, un aspect collectif et une stimulation physique complète. Cela sollicite l’endurance, l’équilibre, le renforcement musculaire, etc. Malheureusement, il n’y avait pas d’études réalisées auprès des seniors, principalement en raison de son développement récent. Nous avons donc réalisé une première étude portant sur une seule séance avec 38 participants, qui a montré que cet outil génère une expérience utilisateur positive, un plaisir élevé, ce qui nous intéressait particulièrement, ainsi que des intensités physiques et une charge de travail adaptées à l’entraînement des personnes âgées.

Suite à ces premiers résultats, nous avons décidé de mettre en place une étude plus importante, une étude interventionnelle avec 34 sujets. Nous avons recruté des personnes âgées inactives en bonne santé et avons mené une étude sur 14 semaines, au cours desquelles les participants ont suivi un programme de deux séances d’une heure par semaine pendant 12 semaines. Les participants ont été répartis en deux groupes : un groupe qui a réalisé le programme d’exergame présenté précédemment et un groupe qui a suivi un programme de marche et de renforcement musculaire plus classique, habituellement utilisé dans les études. Nous avons effectué des tests physiques et cognitifs avant et après les programmes pour évaluer l’évolution et comparer les résultats entre les deux groupes. Nous avons également évalué la présence, les intensités des efforts et le plaisir perçu par les participants. Les résultats ont montré une adhésion élevée dans les deux groupes, mais un plaisir significativement plus élevé dans le groupe d’exergame par rapport au groupe de marche, avec des intensités d’effort considérées comme modérées, ce que nous recherchions précisément.

Les résultats de notre étude ont confirmé que les exergames, en tant qu’outil d’activité physique combinée, génèrent un plaisir élevé et une forte adhésion. Sur le plan physique, nous avons observé des améliorations dans la quasi-totalité des fonctions évaluées, à l’exception de la force du haut du corps qui n’a pas été améliorée. Cela montre que les deux programmes, les exergames et le programme de marche et de renforcement musculaire, ont des effets bénéfiques. Sur le plan cognitif, la mémoire visuo-spatiale à court terme s’est améliorée pour les deux groupes, sans différence significative entre eux. Cela peut être attribué aux effets bénéfiques de l’activité physique et du renforcement musculaire présents dans les deux programmes.

Cependant, le programme d’exergame a montré une amélioration supplémentaire de la mémoire visuo-spatiale de travail, de l’inhibition et de la double tâche. Ces bénéfices supérieurs peuvent être dus à la stimulation cognitive spécifique offerte par les exergames. De plus, la complexité des mouvements sollicités lors des exergames ainsi que la stimulation combinée de l’entraînement physique et cognitif peuvent contribuer à l’amélioration des fonctions cognitives. Enfin, l’aspect social des séances en groupe et les jeux impliquant la coopération et l’opposition favorisent également le développement des fonctions cognitives.

En résumé, nos recommandations en matière d’activité physique rejoignent celles précédemment évoquées. L’entraînement multi-domaine, et plus spécifiquement l’entraînement combiné, est particulièrement intéressant. Les bénéfices peuvent être observés à partir de 3 mois d’entraînement, avec une fréquence d’au moins 2 séances par semaine. Bien que l’OMS recommande 150 minutes d’activité physique par semaine, nous avons constaté des bénéfices significatifs avec cette fréquence. Enfin, il est essentiel de choisir des activités physiques plaisantes et qui suscitent l’adhésion des seniors.

Maintenant, la question principale qui se pose concrètement est la suivante : quelles modalités ont contribué à générer des bénéfices plus élevés ? Il est intéressant d’inclure dans notre programme des éléments tels que la complexité motrice, la stimulation cognitive, l’engagement dans des activités combinées et collectives, la coopération, ainsi que l’aspect de la vie quotidienne, entre autres.

Mon sujet de thèse porte spécifiquement sur ces aspects et vise à répondre partiellement à ces questions en identifiant le programme optimal. Cette étude est actuellement en cours et s’inscrit dans le cadre d’une étude interventionnelle. Nous utiliserons le même processus que celui que j’ai présenté précédemment, mais cette fois-ci, nous comparerons sept groupes comprenant un total de 175 participants.

Nous allons comparer deux groupes : un groupe suivant un programme d’activité physique collective axé sur la coopération, tel que présenté précédemment, et un groupe suivant un programme d’exergame qui sera mis en place, avec l’assistance d’une Nintendo Switch. Nous aurons également un groupe suivant un programme de vélo combiné à des entraînements cognitifs à l’aide de jeux vidéo, un groupe suivant un programme de vélo seul, un groupe suivant un programme de jeux vidéo seul, et enfin, un groupe de contrôle permettant de mesurer les effets des programmes.

Le processus sera similaire : des séances d’entraînement d’une heure par semaine pendant 12 semaines, avec des tests physiques et cognitifs effectués avant et après les programmes. Nous effectuerons également des tests de rétention trois mois après les programmes afin d’évaluer si les bénéfices se maintiennent.

Actuellement, nous avons mis en place les deux premiers programmes. Ils viennent de se terminer cette année à Montreuil. Le prochain programme se déroulera à Créteil de septembre à décembre de cette année. Ensuite, il restera deux programmes à Paris. Enfin, nous sommes encore à la recherche d’un partenaire pour mettre en place le dernier programme d’entraînement cognitif.

De 2022 à 2024, nous testons également des participants du groupe contrôle. Donc, si parmi vous il y a une structure ou une collectivité intéressée par la mise en place de mon dernier programme, n’hésitez pas à m’en informer. Surtout, si vous connaissez des seniors qui seraient partants pour y participer, je vous enverrai l’appel à communication. Ce serait un plaisir de les intégrer.

Merci pour votre attention et pour vos réponses aux questions. C’était très sympa.

Jean-Charles POMEROL

Une remarque peut-être, les groupes de 25, ce n’est quand même pas beaucoup pour obtenir des résultats significatifs sur des effets qui ne sont pas énormes.

Néva BERAUD-PEIGNE

En fait, nous avons une cohorte totale de 175 personnes. Donc, le but est effectivement de comparer les groupes, mais aussi de regrouper les groupes pour observer des effets un peu plus généraux avec ce nombre de 175 participants. Pour l’instant, c’est l’une des plus grandes études qui sera réalisée dans ce domaine. De plus, nous avons effectué des calculs de taille d’échantillon qui nous permettent de détecter des effets positifs, s’il y en a. Donc, nous comprenons que les échantillons ne sont pas très importants, mais c’est l’échantillon nécessaire pour observer des bénéfices potentiels. Il faut également prendre en compte la problématique éthique des études, qui limite le nombre de participants que nous pouvons solliciter. Nous n’avons pas le droit de solliciter 50 participants si nous avons seulement besoin de 25 pour démontrer des effets. Voilà un peu pour répondre à cette question. Mais effectivement, ce serait idéal si nous pouvions avoir 100 participants dans chaque groupe, mais cela devient beaucoup plus complexe à mettre en place.

Joël BELMIN

Merci pour votre présentation. Dans mon équipe, nous nous intéressons beaucoup aux exergames, mais pas pour les personnes en bonne santé. Nous nous concentrons plutôt sur leur utilisation dans la réhabilitation, notamment dans une étude en cours sur un exergame intéressant qui est personnalisable. Nous l’utilisons spécifiquement pour la réhabilitation des patients ayant des problèmes de chute. Il semble que ce soit une approche très intéressante à utiliser, car elle permet de combiner à la fois des aspects cognitifs et physiques. Sur le plan physique, nous nous concentrons principalement sur l’équilibre, mais moins sur les aspects musculaires et cardiorespiratoires. C’est vraiment une approche axée sur l’équilibre et la cognition, car elle offre de puissantes possibilités pour les capacités attentionnelles.

Néva BERAUD-PEIGNE

Je suis totalement d’accord avec vous sur ce point. En effet, l’efficacité des exergames dépend de la sélection des jeux. C’est pourquoi nous utilisons un exergame spécifique qui nous permet de résoudre ce problème. Actuellement, les exergames disponibles ne génèrent pas une dépense énergétique suffisamment importante ni ne favorisent suffisamment le mouvement pour permettre une amélioration significative de la force musculaire.

Cependant, nous avons découvert que les outils que nous utilisons sont intéressants, car ils offrent beaucoup d’espace. Nous disposons d’un mur assez grand qui s’étend sur plusieurs mètres, ce qui permet une sollicitation plus intéressante que les exergames classiques tels que la Wii ou d’autres. J’aimerais savoir quel exergame vous utilisez dans votre laboratoire ?

Joël BELMIN

Je suis tout à fait d’accord avec vous sur l’importance de travailler contre résistance pour améliorer la fonction musculaire. Sans cette composante, il y a peu de chances d’obtenir des résultats significatifs. Dans notre cas, nous utilisons un exergame développé par une start-up de Montpellier. Il s’appelle Medi Move et nous l’avons choisi en raison de sa capacité à être paramétré. En tant que médecins de rééducation, cela nous permet de sélectionner les mouvements spécifiques que nous souhaitons que nos patients effectuent dans le cadre de leur réhabilitation. Il est important de souligner que nous travaillons avec des personnes qui ont subi des chutes ou qui présentent des déficits moteurs, donc notre approche diffère de celle utilisée pour des personnes en bonne santé. Les psychomotriciens peuvent paramétrer les mouvements du patient, qui interagissent avec le jeu, et ces mouvements sont détectés par des capteurs Kinect.

Je rejoins également le point évoqué par le professeur Pomerol concernant la taille des échantillons. La recherche dans ce domaine est complexe, et il peut être intéressant d’explorer la possibilité de tester moins d’interventions sur des groupes plus importants. Dans notre expérience de recherche avec les personnes âgées, nous avons constaté que cela n’est pas si facile, notamment chez les personnes très âgées et malades. Il peut y avoir une attrition importante en raison d’événements imprévus qui incitent les participants à abandonner l’étude ou en raison de problèmes de santé. Donc, la réalité est que ce n’est pas aussi simple qu’il n’y paraît. Parfois, même avec des groupes de 25 personnes, nous n’obtenons pas un effectif complet si l’intervention est assez longue.

Il est important de prendre en compte ces facteurs lors de la conception et de la mise en œuvre des études, afin de mieux comprendre les résultats obtenus.

Néva BERAUD-PEIGNE

En effet, la principale différence réside dans le fait que mes études portent principalement sur des seniors qui sont encore relativement jeunes. En général, la moyenne d’âge se situe autour de 60 à 70 ans, et nous sélectionnons des participants sans démence ni autres pathologies, ce qui nous permet de travailler avec des échantillons initialement plus restreints. Cependant, je suis d’accord avec vous sur l’importance de prendre en compte la taille des échantillons dans nos études. Je vous remercie pour vos commentaires et retours.

 

11h00 : Comment avoir l’adhésion des séniors ? Bienfaits psychologiques et sociaux de l’activité physique

Intervenant : Sterenn POULHES, enseignante en Activité Physique Adaptée au sein de la structure MooveToi

Je suis ravie d’être présente parmi vous. Je suis enseignante en activité physique adaptée (APA) et j’ai obtenu ma licence STAPS en activité physique adaptée à l’université de Paris. J’ai ensuite poursuivi mes études en master VHMA (vieillissement, handicap, mouvement et adaptation).

Aujourd’hui, nous allons aborder une problématique récurrente : l’engagement et l’assiduité des seniors dans la pratique de l’activité physique et l’adoption d’un mode de vie actif au quotidien. Les effets bénéfiques de l’activité physique sont largement démontrés dans la littérature scientifique, mais la question qui persiste est celle de renforcer l’adhésion à cette pratique. Dans un deuxième temps, nous examinerons les bienfaits psychosociaux de cette activité, en nous concentrant davantage sur cet aspect par rapport aux effets cognitifs et physiques.

Pour commencer, jetons un coup d’œil à quelques chiffres concernant l’inactivité physique au sein de la population française dans son ensemble. Une étude récente réalisée par l’Insee en 2022 révèle que près de 95 % de la population française est exposée à un risque de détérioration de sa santé en raison d’un manque d’activité physique ou d’une sédentarité prolongée. Sur les trente personnes présentes dans ce webinaire, seulement 2 ou 3 pratiquent suffisamment d’activité physique, ce qui est alarmant. Maintenant, imaginez cela dans la population senior, où il y a des problèmes d’arthrose, des prothèses de hanche, des maladies comme Parkinson, et d’autres difficultés et obstacles supplémentaires à la pratique d’une activité physique suffisante. En fait, un senior sur trois ne respecte pas les recommandations en matière d’activité physique. Je vous recommande d’ailleurs de consulter le rapport paru l’année dernière sous l’impulsion du ministère des Sports, qui est assez complet. Il nous apprend également que plus de 80 % des seniors ont des comportements sédentaires élevés. Nous sommes conscients de ces chiffres, et je pense que si vous travaillez auprès des seniors, vous en êtes témoins. Mais ce qui nous intéresse le plus, c’est de comprendre pourquoi ils pratiquent si peu d’activité physique, quels sont les obstacles auxquels ils sont confrontés. Le médecin a évoqué plusieurs freins tout à l’heure, mais nous avons également réalisé une enquête auprès des seniors pour savoir quels sont, selon eux, les trois principaux obstacles à la pratique de l’activité physique.

Nous avons donc dressé un podium des trois motifs de non-pratique. L’état de santé global est cité en troisième position comme frein à la pratique de l’activité physique chez les seniors. Cependant, il est important de souligner que les enseignants en activité physique adaptée sont là pour répondre à ce besoin. Nous sommes qualifiés pour intervenir auprès de tous les types de public, qu’il s’agisse de personnes ayant des limitations fonctionnelles minimes ou sévères. Ainsi, nous pouvons adapter la pratique en fonction de l’état de santé et des limitations de chacun. Par conséquent, l’état de santé ne devrait pas constituer un obstacle pour les seniors.

En deuxième position, le frein le plus souvent mentionné est le manque de temps. Bien que je pense personnellement que ce soit un peu exagéré, il est possible que l’enquête ait été réalisée avec des soixantenaires qui, de nos jours, peuvent être considérés comme des seniors mais ne prennent leur retraite qu’à l’âge de 64-65 ans, voire plus tard. Ainsi, le manque de temps peut être un obstacle pour certains seniors. Cependant, si un retraité affirme ne pas avoir le temps de pratiquer une activité physique, il est important de leur montrer la courbe de Néva au début de la présentation, avec l’exemple d’Henriette et d’autres personnes. Cela démontre qu’à 60 ans, même si l’on n’a pas eu un mode de vie actif jusqu’à présent, il est encore possible de recommencer à pratiquer une activité physique, de profiter de la retraite pour prendre soin de soi et prendre le temps de le faire. Cela permet de retarder l’apparition des incapacités liées à l’âge.

Enfin, le motif numéro un est le manque d’envie. Il est clairement lié à un manque de désir. À l’âge de 60 ans, la dimension santé joue en partie un rôle dans la motivation, mais à partir de 70 ans, il apparaît que le plaisir est un élément essentiel de la motivation. Le plaisir est un déterminant crucial qui influence le temps qu’une personne consacre à une activité physique. Par conséquent, il est essentiel de créer des activités physiques attrayantes. Cela signifie qu’elles doivent offrir une forte interaction sociale. Comme l’a mentionné Néva, il ne faut pas hésiter à orienter les seniors vers des activités collectives telles que le basket, le volley-ball, le handball, des sports de raquette ou encore la boxe. Cela permettra une grande variété de situations et une diversité dans les tâches d’apprentissage. L’aspect ludique et le jeu doivent être mis en avant dans la pratique. Il est également important de conserver la logique interne de l’activité, ce qui signifie ne pas se limiter systématiquement à des activités douces comme la gym sur chaise, le yoga sur chaise ou la marche. Il est préférable d’orienter les seniors vers des activités qui respectent la logique interne du sport, tout en adaptant certains aspects tels que la taille et le poids de la balle, les règles et les situations en fonction du public. En agissant ainsi, nous pouvons enrichir les interactions, les situations et avoir un impact non seulement sur la condition cognitive et physique des seniors, mais aussi sur les interactions sociales, ce qui est extrêmement important.

Jean-Charles POMEROL

Je voudrais intervenir sur ce point, car j’ai souvent observé que les personnes participent davantage lorsqu’elles sont en groupe, avec des amis. L’aspect de l’interaction est vraiment important pour la motivation et le plaisir.

Sterenn POULHES

Vous faites une excellente transition vers la deuxième citation, je vais enchaîner directement. “Les programmes menés en groupe présentent davantage de bénéfices sur le niveau d’engagement, notamment sur le niveau d’adhésion à court terme.” Une méta-analyse réalisée par Conn et al. a mesuré le niveau d’engagement des seniors et a constaté que les programmes en groupe favorisaient une plus grande adhésion. Par conséquent, n’hésitez pas à intégrer des activités collectives dans vos programmes, en commençant par le collectif pour ensuite évoluer vers une pratique plus autonome et individuelle, afin de favoriser l’adhésion à la pratique.

C’est pourquoi, au sein de “MooveToi”, nous mettons vraiment l’accent sur l’aspect ludique dans nos pratiques afin de stimuler la motivation de nos participants. Permettez-moi de reprendre rapidement nos cinq axes d’intervention, nos cinq piliers. Nos programmes visent à préserver et améliorer l’état de santé des bénéficiaires. Nous réalisons des évaluations de la condition physique et cognitive en amont, parfois pendant et à la fin du programme. Nous concevons nos programmes en fonction des recommandations scientifiques, adaptés à chaque pathologie. L’aspect ludique est l’un des deux points les plus importants. Nous faisons appel à des professionnels qualifiés, uniquement des enseignants en activité physique adaptée titulaires d’au moins une licence STAPS mention activité physique adaptée, voire d’un master dans le même domaine. Nous sommes tous formés à l’éducation thérapeutique du patient de niveau un. Dans notre équipe, tous les intervenants sont salariés en CDI, nous ne faisons pas appel à des auto-entrepreneurs. Cela est important pour nous afin de valoriser notre profession et d’assurer une qualité dans nos interventions. Nous collaborons avec différents acteurs et partenaires, tels que des hôpitaux, des associations, des collectivités et des mutuelles.

Pour rebondir sur ce que le professeur a mentionné lors de sa première intervention, il existe des portes d’entrée vers le sport, notamment avec la prescription du sport sur ordonnance, et nous travaillons avec la mutuelle des sportifs. Certains bénéficiaires peuvent se faire rembourser jusqu’à 500€ par an par leur mutuelle pour des activités physiques. Nous sommes également opérateurs pour le PRIF (Prévention Retraite Ile de France), qui finance gratuitement des ateliers de prévention, y compris des ateliers de prévention autour de l’activité physique, de prévention des chutes et des ateliers de marche. Ces ateliers sont gratuits pour les participants et accessibles à tous les retraités franciliens. N’hésitez pas à consulter le site internet du PRIF ou à partager cette ressource avec les seniors que vous accompagnez.

Il existe donc de nombreuses initiatives qui se mettent en place, bien qu’elles soient parfois disséminées et pas faciles à trouver. Heureusement, les choses évoluent depuis la possibilité de prescrire le sport sur ordonnance en 2016 et la valorisation du métier des enseignants en activité physique adaptée. N’hésitez pas à nous contacter si vous avez besoin de ressources supplémentaires sur ce point.

Jean-Charles POMEROL

Donc, dans quels lieux intervenez-vous et quel est le coût ?

Sterenn POULHES

Comme je l’ai mentionné, nos interventions se font dans une grande variété de structures. Nous intervenons dans leurs locaux, et j’ai omis de le préciser, mais nous intervenons également à domicile. Nous sommes un service à la personne, ce qui nous permet de proposer des séances à domicile avec des tarifs réduits de 50%. Nous avons des parcours qui couvrent différentes zones en Île-de-France. Je pourrais vous fournir plus de détails à ce sujet.

Jean-Charles POMEROL

En effet, si vous intervenez à domicile, il y a davantage d’interaction. Il est intéressant de regrouper un certain nombre de personnes qui s’entraînent mutuellement.

Sterenn POULHES

Oui, je vais vous présenter juste après les différents programmes ouverts au public et leurs financements. Les séances à domicile peuvent être une bonne option pour les personnes qui seraient trop dépendantes pour se rendre à nos séances ou qui sont en période de rééducation. Cela peut être une phase transitoire avant de rejoindre des activités collectives. Toutefois, notre approche consiste généralement à proposer des activités collectives avant les séances individuelles.

Permettez-moi de me concentrer sur le département du Val-de-Marne (94), car je sais que Futurâge est porté par ce département. Nous intervenons avec le DAC (Dispositif d’Appui à la Coordination) financé par l’ARS sur les programmes après-cancer. Nous travaillons également avec des résidences et des établissements tels que Coallia et Apogée à Créteil, ainsi qu’avec la ville de Créteil. Pour vous montrer concrètement le type de programme ludique pour seniors que nous avons développé avec “MooveToi”, il y a le programme APA d’âge pour boxer, soutenu par la conférence des financeurs de Paris. Il s’agit d’un programme de 20 semaines, avec une heure de pratique hebdomadaire. Nous proposons des séances de boxe adaptée ludique avec des groupes de 12 à 15 participants, des conférences de sensibilisation et des bilans individualisés tout au long du parcours. Les objectifs de ce programme sont la prévention des chutes, en utilisant les déplacements et les exercices qui sollicitent les appuis que la boxe permet. Nous travaillons également beaucoup sur la stimulation cognitive. La boxe est une activité très complète qui permet de travailler la mémorisation, la mémoire à court terme, la mémoire de travail, ainsi que l’anticipation, la tension et les réflexes. C’est une activité adaptée à la prévention des chutes, qui favorise également les interactions sociales grâce à son caractère d’activité d’opposition.

Nous avons également été lauréats de l’appel à projets Paris Senior Plein Air, avec notre programme de basket santé pour seniors. Si vous souhaitez obtenir des informations plus récentes, n’hésitez pas à me contacter à la fin de la présentation. En ce qui concerne le public que nous touchons chez “MooveToi” et en général chez les seniors, nous constatons que plus de 80 % sont des femmes. Il est souvent difficile d’atteindre les hommes, nous avons donc principalement un public féminin. Proposer des activités genrées telles que la boxe ou le basket peut être un levier supplémentaire pour favoriser l’adhésion à la pratique. Cela crée un effet de surprise et permet à ces femmes de pratiquer une activité physique qu’elles n’ont généralement pas eu l’occasion de pratiquer dans leur enfance ou pendant leur vie active, car elles étaient peu ouvertes à la pratique féminine. Je pense que cela peut être un levier supplémentaire intéressant, et il y aurait certainement des études sociologiques à mener sur ce sujet, car il n’y a pas encore suffisamment de recherches à ce sujet.

On propose également des événements intergénérationnels, ce qui est encore peu courant mais qui permet de créer un fort engagement aussi bien chez les jeunes que chez les seniors. Nous avons mis en place ces événements en collaboration avec certains de nos partenaires, en combinant des services civiques, des collégiens et des lycéens, sous la forme de tournois avec des équipes mixtes composées de jeunes et de seniors, et des ateliers adaptés accompagnés de conférences interactives. Ce format est très impactant. Nous organisons également nos propres événements conviviaux en plein air. Pourquoi en plein air ? Parce que le même exercice réalisé en intérieur et en extérieur présente davantage de bienfaits lorsqu’il est pratiqué en extérieur. Des études ont démontré notamment les avantages sur la santé mentale. Nous nous efforçons donc au maximum de mettre en place des événements en extérieur, où nous invitons à la fois nos seniors que nous suivons à domicile et nos seniors résidant en établissement, afin de favoriser les rencontres inter-établissements et d’augmenter les interactions et les liens sociaux.

Maintenant, nous allons nous intéresser davantage à la dimension psychosociale et à ce que peut apporter l’activité physique pour bien vieillir. Un vieillissement réussi repose sur un modèle tridimensionnel comprenant l’absence de maladie ou de facteurs de risque, un haut niveau de fonctionnement physique et cognitif, ainsi qu’une vie socialement enrichissante, comme nous l’avons vu précédemment dans les présentations. Les effets de l’activité physique sur la santé physique et cognitive ont déjà été démontrés, nous n’y reviendrons donc pas. Nous allons maintenant examiner en quoi l’activité physique peut améliorer la santé mentale.

L’activité physique permet tout d’abord de préserver certaines fonctions exécutives, comme cela a été souligné par Néva précédemment. Ce qui est également très important, c’est que les seniors sont souvent sujets à des symptômes dépressifs. Selon une étude, ces symptômes dépressifs sont rapportés chez environ 15% des personnes âgées, un chiffre qui est largement sous-estimé. Les symptômes dépressifs constituent un facteur prédictif important dans l’évolution vers une démence ou des maladies neurodégénératives. Il est donc crucial de traiter rapidement ces symptômes, car ils sont préoccupants. L’activité physique permet précisément d’améliorer ces symptômes associés à la dépression légère à modérée, ainsi que les symptômes anxieux. Parallèlement, l’activité physique améliore également l’efficacité des traitements pharmacologiques contre les dépressions majeures chez les personnes âgées. Il s’agit donc d’un atout important pour lutter contre ces syndromes dépressifs, ainsi que pour prévenir les maladies neurodégénératives et l’apparition de la démence.

Effectivement, il existe un autre phénomène extrêmement important qui se produit pendant la pratique de l’activité physique, à savoir les mécanismes neurophysiologiques. Pendant l’activité physique, la libération de neurotransmetteurs se produit, ce qui améliore la santé mentale, notamment grâce à la sérotonine, la dopamine et la noradrénaline. La sérotonine joue un rôle crucial dans l’équilibre du sommeil, de l’appétit et de l’humeur, des fonctions qui tendent à décliner avec l’âge, mais qui peuvent être améliorées grâce à l’activité physique. La dopamine, quant à elle, est responsable de la régulation de l’humeur et de la motivation, et on constate souvent des troubles de l’humeur et une perte de motivation chez les seniors. En pratiquant régulièrement une activité physique, on stimule la production de dopamine, ce qui améliore ces aspects. Enfin, la noradrénaline, qui est impliquée dans l’attention et le sommeil, est également libérée pendant l’activité physique, ce qui a un impact positif sur la qualité du sommeil et de l’attention.

En ce qui concerne la santé mentale, il existe un consensus scientifique associant le respect des recommandations en matière d’activité physique à l’amélioration de la santé mentale chez les personnes âgées. J’ai sélectionné les informations les plus importantes, mais il y a encore beaucoup de recherches à mener sur le sujet.

Pour ce qui est de la santé sociale, les activités collectives riches favorisent la création de liens sociaux, permettent de faire de nouvelles rencontres, luttent contre l’isolement, qui est un fléau parmi nos aînés, et renforcent le sentiment de compétence et d’appartenance au groupe. Comme l’a souligné Jean-Charles, plus l’effet de groupe se manifeste, plus nous avons tendance à continuer à pratiquer une activité physique. Cela améliore donc l’adhésion à la pratique et, par conséquent, la santé mentale des seniors.

J’ai essayé de présenter ces informations de manière concise pour respecter le timing. Si vous avez des questions, n’hésitez pas à me contacter par e-mail ou dans le chat. Merci de votre attention.

Jean-Charles POMEROL

Je voudrais tout d’abord remercier les intervenants pour leurs contributions complètes et claires. Il est crucial de souligner les bénéfices d’une activité physique et cognitive combinée pour un vieillissement en bonne santé. Bien que la France ne soit pas en avance sur les aspects préventifs, cela fait partie de la prévention. Nous reviendrons sur ce sujet en septembre pour approfondir la question préventive. Cependant, j’aimerais donner la parole à Sterenn pour aborder un point qu’elle a mentionné rapidement. Dans vos groupes, où vous proposez des activités culturelles, scientifiques, etc. destinées aux personnes âgées, vous avez en moyenne 20 femmes pour 3 hommes. Est-ce que quelqu’un s’est posé la question de comment motiver les hommes ? Après tout, ce sont eux qui semblent se laisser vieillir dans leur canapé.

Sterenn POULHES

Oui, en effet, les hommes qui viennent régulièrement le font souvent sous l’impulsion de leur femme. Il est vrai que les motiver est compliqué, mais je dois avouer que je n’ai pas de réponse à cette question. Néanmoins, je sais qu’il existe de plus en plus d’opérations de prévention qui cherchent à cibler spécifiquement les hommes. Cependant, je pense que cela nécessite un changement culturel. Peut-être qu’avec les prochaines générations, nous observerons une diminution de ce phénomène. Je ne suis pas une experte sur cette question, mais j’aimerais également connaître la réponse.

Jean-Charles POMEROL

La question que je me pose est la suivante : existe-t-il des programmes dédiés ou une réflexion spécifique à ce sujet ?

Sterenn POULHES

Eh bien, comme vous l’avez constaté, nos programmes sont conçus pour être mixtes. Pourtant, certains hommes ont peur de rejoindre ces groupes, peut-être par crainte de participer à des activités perçues comme étant féminines. Il est vrai que la plupart des formats que nous proposons sont créés pour les femmes. Cependant, nous proposons également du basket et de la boxe, mais malgré cela, nous constatons toujours une faible participation masculine. Nous nous efforçons également de réfléchir à cette question, mais pour l’instant, nous n’avons pas de réponse. Il est vrai que l’espérance de vie plus longue des femmes peut également contribuer en partie à expliquer ce phénomène.

Joël BELMIN

En fait, j’aimerais faire une remarque sur le fait que nous disposons de stratégies assez efficaces, peu dangereuses et relativement peu coûteuses, mais il est frappant de constater que les gens n’en profitent pas. Dans mon expérience, j’ai l’impression qu’il y a un effet important lors des premiers pas, c’est-à-dire les premières séances. Une fois que les personnes parviennent à surmonter les barrières initiales, en particulier au cours des trois premières séances, elles adhèrent davantage. Il faut consentir un investissement important pour surmonter une sorte de résistance passive ou de préjugés. Je pense que cela relève en grande partie de la mentalité des gens qui se disent : “Ce n’est pas pour moi” ou “Vous voyez, j’ai des problèmes liés à l’âge”. Je trouve intéressant que vous ayez une double formation en APA et en éducation thérapeutique, car c’est ce que l’on apprend dans l’éducation thérapeutique. Il s’agit notamment de réaliser des diagnostics et des entretiens motivationnels, pour comprendre les freins et travailler dessus. Bien sûr, nous ne pouvons pas forcer les gens, mais il est important de surmonter ces freins en douceur, pour permettre aux gens de commencer. Une fois qu’ils ont commencé, tout se passe bien. Par exemple, s’ils trouvent un moniteur compétent, cela peut être rassurant. Toutefois, le plus difficile est de franchir le premier pas, et je n’ai pas de solution miracle. Peut-être faudrait-il réfléchir à des interventions structurées, à une professionnalisation similaire à celle que nous avons réalisée en éducation thérapeutique. L’idée serait d’élaborer des programmes initiaux pour les personnes atteintes de maladies chroniques nécessitant un traitement sur plusieurs années, en théorisant et en identifiant des stratégies. Je pense que cela pourrait fonctionner pour certains individus.

Nicolas RAMEAU, directeur de l’association Campus Urbain

J’ai une question un peu particulière : y a-t-il une différenciation entre les personnes vivant à la campagne et celles vivant en ville ? Notamment, en ville, une fois qu’ils ont terminé leur travail, on constate que la génération étudiée est moins active dans les tâches ménagères quotidiennes. Il y a moins de mouvements et une plus grande propension à rester assis sur le canapé. En revanche, à la campagne, c’est un peu l’inverse. Chez les paysans, par exemple, l’homme reprend plutôt les activités extérieures comme le jardinage, tandis que la femme est davantage affectée aux tâches ménagères. Elle reste tout de même active dans ce domaine, mais peut-être de manière plus ritualisée. J’aimerais savoir s’il existe des éléments comparatifs à ce sujet, d’autant plus que ces générations ont été marquées par des efforts visant à égaliser les rôles entre hommes et femmes, que ce soit sur le plan professionnel ou à la maison. Ces efforts ne sont pas encore terminés, mais à l’époque, nous n’étions pas du tout dans cette approche.

Sterenn POULHES

À ma connaissance, il n’y a pas d’études spécifiques sur ce sujet, car je pense que ce serait très délicat à étudier. Cela relèverait davantage de la sociologie et cela dépendrait de la composition de chaque foyer. Il serait difficile de généraliser ou d’établir des moyennes sur ce type de pratique. Cependant, en ce qui concerne simplement le fait de vivre en ville ou à la campagne, je pense effectivement qu’en ville, il y a plus d’offres d’activités physiques accessibles. Cependant, nous avons tendance à être plus sédentaires dans nos vies urbaines et à disposer d’espaces plus restreints, ce qui limite notre activité physique quotidienne. Je pense que les grands espaces de la campagne favorisent davantage l’activité physique. En ce qui concerne la répartition des rôles au sein des couples, je pense qu’il y a effectivement une influence générationnelle. Encore une fois, cela évoluera, mais pour ma part, je ne saurais pas répondre précisément à cette question.

 

11h30 : CONCLUSIONS

Farid TALEB

Je tiens à vous remercier sincèrement pour l’ensemble de ces échanges et les perspectives offertes dans ce domaine, tant au niveau des études que des activités sur le terrain. Je souhaite également exprimer ma gratitude non seulement envers les intervenants pour la qualité de leurs échanges et présentations, mais aussi envers les participants qui ont répondu présents à cet événement. Je souhaite vous informer que nous retranscrirons l’ensemble des échanges afin de les rendre disponibles sur notre site internet, ainsi qu’une version audio pour ceux qui n’ont pas pu être présents ou pour une écoute ultérieure.

De plus, je vous invite à participer à notre prochain webinaire qui aura lieu le mardi 4 juillet, dans le même format et à la même heure. Cette fois-ci, nous aborderons la difficulté d’accompagner les aidants familiaux de personnes en perte d’autonomie ou en situation de handicap. Vous recevrez bientôt un programme complet à ce sujet. En attendant, je vous souhaite une excellente journée. Je laisse maintenant la parole à Jean-Charles pour conclure.

Jean-Charles POMEROL

Je tiens à remercier Farid pour l’organisation de ce webinaire. Je ne vais pas m’étendre davantage. Merci à tous d’avoir été présents. Il est indéniable, sur le plan scientifique, que l’activité physique et cognitive a des bienfaits pour maintenir une bonne santé et bien vieillir, en restant relativement autonome. Ces idées-là ne sont pas discutables. Ce que je vous invite donc à faire, c’est de diffuser ces idées, de partager les informations et de faire connaître les initiatives et activités déjà en cours. Essayez de populariser ces idées. Merci encore. Rendez-vous au prochain webinaire.

Farid TALEB

En effet, nous remercions le territoire Grand Orly Seine Bièvre pour son soutien, comme à chaque fois. Merci à tous et passez une excellente journée. À bientôt.